Paris by Jean Follain

Paris by Jean Follain

Auteur:Jean Follain
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: , atelier panik pour l'éd. Numérik
Publié: 2012-07-29T04:00:00+00:00


MES DE PARIS

Le long des derniers coteaux des fortifications, une fillette à peine nubile, au bras un adjudant, se promenait ; ses chaussures strictement cirées brillaient : lorsqu’il crut n’être vu de personne, il embrassa à plusieurs reprises sa très jeune maîtresse.

La chaleur tombait, des voix montaient enrouées, celles de gars qui assis en rond sur l’herbe courte sacraient d’avoir renversé par mégarde un litre de vin épais.

Un homme était assis contre le mur d’une bicoque en planches, on pouvait constater qu’il dessinait des figures et se plongeait dans la mathématique, constatation propre à emplir d’une magnifique poésie le paysage démantelé.

La vue de tourbillons d’insectes entourant des débris animaux fit qu’un promeneur, martelant de son pas le vieux terrain de défense guerrière, ressentit comme Bernardin de Saint-Pierre l’existence des plus naïves harmonies.

Alors il gagna un haut lieu pour contempler Paris étendu sous ses pieds. Il distingua les flèches et les tours. Il situa le vieux Paris des équipages ; de ses valets gourmés et chamarrés beaucoup étaient enfouis aujourd’hui dans la terre de Champagne ou d’Artois sous des croix de bois que les vers entamaient. Il situa aussi les vieux quartiers du crime. Aidé d’une longue-vue de l’ancienne marine, il décela la tache verte des Buttes-Chaumont où l’eau demeure si calme sous le pont des Suicidés. À l’horizon opposé se dressait l’architecture fine de la tour Eiffel, dont la vision journalière morfond les troupiers butés qui font leur temps à l’Ecole militaire.

Mais la longue-vue de l’ancienne marine ne permettait point de tout contempler aux cœurs et confins d’un Paris de lys, de fange et d’or, ni les inscriptions sur les colonnes, ni les mascarons des maisons grises, ni aux terrasses de café les femmes aux chapeaux garnis d’épis et de fleurs, ni la main qui tourne la clenche de la porte, ni le gant qu’on enlève pour dénuder la main à l’heure des journaux du soir.

Le crépuscule de Paris tombe alors que les ministres sortent des conseils et que rougeoie l’électricité des enseignes. Un camionneur à propos d’un rien, dit en riant à son compagnon : « Tire la bobinette et la chevillette cherra. »

Certains, qui n’avaient imaginé de fleurs que comme motifs à romances, cherchent maintenant nerveusement une fleuriste dans le quartier peu passager où sifflent des sirènes. Au fracas des autobus sous le ciel pâle, des cœurs vibrent à toutes les images, à toutes les rumeurs. Tout au fond leur demeure ce goût délicieux des fruits d’un verger d’enfance.



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